Brandali
À l’origine de cet ouvrage, se déploient 14 photographies en noir et blanc. En écho aux quatorze livres d’Albion : le poids d’une pierre. Ce symbole tellurique oriente dès la première image les mots vers l’intérieur. Dos à la mer, les regards des deux photographes se posent sur les terres dans une faille temporelle. Celle d’un temps rêvé, où la matière transformée se mêlait à la matière brute, s’y glissait, s’y camouflait pour faire corps avec le végétal et le minéral. Tour à tour l’œil des deux artistes se rapprochent et s’éloignent du sol. Le derme de Gaia et de ses créatures se déclinent au fil des images, rugueux, pelissé, piquant, charnu. À chaque station de ce voyage tactîle sur les corps et décorps d’un territoire délittoralisé, l’œil de Marie Michelle Leandri et d’Alain Sauvan caresse, s’agrippe, coupe, creuse, frôle pour « revenir comme en 14 ». Leurs yeux touchants font table rase des énergies fossiles et s’hydratent au puits des minéralités de leurs sources d’inspiration.
Dont s’abreuvent les plumes des trois poètes. Tous trois, sans s’adonner à un anthropomorphisme, donnent à entendre les inanimés. Tantôt lapidaires, tantôt chlorofilants ou grommelants, les poèmes des Brandalittérateurs re-bêlent un territoire désaltéré. À toutes ces créatures telluriques, faunistiques, végétales, lyophilisés par l’habitude ils apportent l’eauralité rédemptrice – l’écriture n’est que l’empreinte poétique destinée à être lue, récitée, chantée. Pierres, cactus, sables, visages et peaux semblent se mouvoir à la lecture et à l’écoute des quatorze poèmes par ordre d’apparition poétique dans le recueil.
Ceccè Ferrara, Ceccè Lanfranchi et Saveriu Valentini.
Et face à la multiplicité des celluloses, les photographies se tordent, se morcellent, se distendent, se floutent, s’éclatent, se dessinent sous la main du graphiste Timothée Comte.